Alors que Joe Biden assimilait Xi Jinping à un “dictateur” il y a moins de cinq mois, le président américain et son homologue chinois échangeront en tête-à-tête mercredi 15 novembre. En marge du sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec) à San Francisco, aux Etats-Unis, les deux hommes auront l’occasion d’acter, cette fois, le rapprochement entre les deux superpuissances mondiales. “Que la rencontre ait lieu est déjà un signal très fort”, confirme à franceinfo Valérie Niquet, responsable du pôle Asie à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).
Dans un contexte international compliqué par les conflits au Proche-Orient et en Ukraine, cette entrevue, qui intervient un an avant l’élection présidentielle américaine, leur permettra de discuter de “la paix et du développement dans le monde”, a assuré Pékin, lundi. Un vaste menu, dont franceinfo détaille les enjeux.
Sonder les intentions de la Chine sur Taïwan
La situation sur l’île de Taïwan, voisine de la Chine, cristallise toujours les tensions entre les deux puissances mondiales. La multiplication des démonstrations de force de l’armée chinoise au large de Taïwan inquiète les Etats-Unis, alors que se profile l’élection présidentielle sur l’île en janvier. Côté chinois, la visite à Taïwan de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants américaine, en août 2022, avait été très mal reçue par Pékin, qui avait suspendu l’essentiel des communications militaires régulières avec les Etats-Unis.
“En vue de cette élection, la Chine veut donner une image moins agressive pour les convaincre les Taïwanais de voter pour des partis moins critiques envers Pékin”, estime Valérie Niquet, même s’il est difficile de lire la politique de Xi Jinping sur ce dossier. “La politique taïwanaise de la Chine est tellement personnalisée, dans les mains de Xi Jinping, qu’on a une véritable question de compréhension de ses intentions”, affirme à France Culture Mathieu Duchâtel, directeur du programme Asie à l’Institut Montaigne.
“Xi Jinping défendra une fois de plus la politique de la Chine unique devant le président Biden. Car la ligne rouge infranchissable, comme l’a maintes et maintes fois répété le gouvernement chinois, c’est la question de Taïwan !”, avance à RFI Gao Zhikai, vice-président du Centre sur la Chine et la mondialisation à Pékin. Joe Biden, lui, doit réaffirmer à la Chine que Washington ne soutient pas une indépendance de Taïwan, et que la politique américaine en la matière n’a pas changé.
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Renouer un dialogue interarmées
La crise à Taïwan a mis à mal la relation militaire entre la Chine et les Etats-Unis. Washington veut une reprise du dialogue. “Le président [Biden] est résolu à voir le rétablissement de liens d’armée à armée, car il estime que c’est dans l’intérêt de la sécurité nationale des Etats-Unis”, a déclaré Jake Sullivan, le conseiller américain à la sécurité nationale, à la chaîne américaine CBS. “Il pense qu’une communication entre armées est nécessaire pour s’assurer que cette concurrence ne dégénère pas en conflit.”
“Les Etats-Unis veulent maîtriser toute escalade dans le domaine militaire, tout en gardant une concurrence vigoureuse dans les domaines technologique et économique, observe Marc Julienne, responsable des activités Chine de l’Institut français des relations internationales (Ifri), sur France Culture. Mais la Chine ne fait pas de distinction entre ces domaines, car ils sont interconnectés.”
Instaurer une concurrence économique saine
Washington veut conserver la plus grande avance possible sur ses concurrents en contrôlant notamment les exportations de semi-conducteurs et les investissements américains en Chine. Mao Ning, la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a exhorté les Etats-Unis, lundi 13 novembre, à “respecter sincèrement les préoccupations raisonnables de la Chine et ses droits légitimes au développement, plutôt que de mettre uniquement l’accent sur leurs propres préoccupations tout en nuisant aux intérêts de la Chine. La Chine n’a pas peur de la concurrence, mais nous nous opposons à une définition des relations sino-américaines en termes de concurrence.”
“La Chine ne cherche pas à changer les Etats-Unis, et les Etats-Unis ne devraient pas non plus chercher à façonner ou à changer la Chine.”
Mao Ning, porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois
en conférence de presse