Giorgos Ferentinos traverse les couloirs animés des urgences pour nous guider dans les autres services de l’hôpital Evangelismós, au cœur d’Athènes. Le cardiologue est de garde, mais il tient à nous montrer ce qui, à ses yeux, caractérise l’état de l’hôpital public grec. Arrivé à l’entrée de l’unité de chirurgie, le médecin, président de l’union des salariés d’Evangelismós, nous annonce que huit salles d’opération sont fermées. “Elles sont neuves, avec du nouveau matériel”, décrit-il. Pourtant, “elles sont vides du fait du manque d’effectifs”. Chaque service souffre du même déficit de personnel.

Le délitement de l’offre de soins a contribué à alimenter la colère populaire qui a éclaté après la catastrophe ferroviaire du 28 février. L’ensemble des services publics est d’ailleurs concerné. A l’approche des élections législatives du dimanche 21 mai, la situation des soignants et leur rémunération se sont invitées dans un débat entre les candidats, mercredi 10 mai.

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Dans l’un des plus grands hôpitaux de la capitale grecque, Giorgos Ferentinos parcourt des couloirs aux murs parfois écaillés. Au 9e étage, le médecin s’arrête devant le service de psychiatrie. Une vingtaine de patients sont alités dans le couloir. Les autres sont réunis dans un espace commun, sans chambre privée, détaille le médecin. Avec les mesures d’austérité enclenchées dès 2010 en échange d’un plan de sauvetage de la Grèce, cinq des neuf cliniques psychiatriques du pays ont fermé, selon le journal Ekathimerini*.

Deux infirmières pour 35 lits

Dans l’ensemble, les dépenses publiques de santé ont reculé de 43% en neuf ans, selon une enquête d’Amnesty International*. “De nombreux actes qui n’étaient pas nécessaires ont été éliminés, mais on a réduit en même temps des soins essentiels”, constate Manos Matsaganis, professeur de finances publiques à l’université polytechnique de Milan et directeur d’un observatoire à la fondation Eliamep, à Athènes. “Le système de santé est plus encadré, ce qui a de bons et de mauvais aspects.” 

La fermeture de certaines structures a “amené des patients vers d’autres hôpitaux, qui sont devenus encombrés”, décrit Giorgos Ferentinos, passant à travers des unités de pathologie. Dans l’un de ces services aux chambres bien occupées, il faudrait idéalement deux infirmières pour quatre lits. “En ce moment, il y a deux infirmières pour 35 lits.” La Grèce souffre depuis longtemps d’un nombre insuffisant d’infirmiers, rappelle Manos Matsaganis. Le pays comptait “trop de médecins et pas assez de personnel”, résume-t-il. 

L’austérité a imposé une règle aussi simple que stricte : pour cinq salariés quittant le service public de santé ou partant à la retraite, un seul soignant était recruté. Les hôpitaux publics n’ont pas embauché de nouveaux médecins ces dernières années. L’âge moyen des docteurs se relève”, développe le chercheur. Selon Ekathimerini*, entre 700 et 750 médecins quittent le système chaque année pour la retraite ou le privé. “De nombreux jeunes partent vers le privé ou à l’étranger”, poursuit d’un débit rapide Dimitra Stamatelou, médecin en pathologie à Evangelismós et membre de la Fédération des médecins de Grèce. D’après Amnesty, près de 20 000 jeunes médecins ont quitté la Grèce entre 2010 et 2020.

“Pensez au jeune docteur qui fait tout ce travail [dans le public], qui court d’un patient à un autre sans repos, sans avoir le temps d’apprendre. Les contrats permanents sont rares.”

Dimitra Stamatelou, médecin à l’hôpital Evangelismós

à franceinfo